"Nous, on chante pour Jésus en l'attendant!"

Susana vit à Miranda une petite communauté tout près de Quito,

la capitale de l’Equateur.

Voici le témoignage qu'elle nous apporte avec beaucoup de fraîcheur!

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"Bonjour, je m’appelle Susana, j’ai 6 ans. Je parle espagnol, la langue officielle du pays mais aussi quelques mots de kichua, la langue de nos grands-parents. Papa travaille dans une fabrique où il coud des chemises. Maman garde les vaches d’une voisine et s’occupe du potager.

J’habite dans la Cordillère des Andes, cette immense chaîne de montagnes qui traverse l’Amérique latine de haut en bas. Notre maison est faite de briques de terre qu’on appelle « adobe » et le toit est en tôle ondulée. Quand il pleut fort à la saison des pluies, ça fait un bruit d’enfer ! Nous sommes six frères et sœurs, ça fait beaucoup dans cette petite maison. Heureusement, il y a plus souvent de soleil que de pluie ! On peut rester alors dehors. Mais malgré tout, c’est bien la pluie. Parfois, l’été, on manque d’eau et on attend impatiemment la pluie pour remplir le réservoir et arroser les champs. Ici, l’eau est précieuse. Parfois, il est permis de récupérer de l’eau du canal Pitatambo qui coule 300 m plus haut dans la montagne mais les vaches et tous les autres animaux salissent l’eau. Quand elle arrive chez nous, elle est trouble. Il faut la faire bouillir longtemps mais malgré ça, on est souvent malades, surtout moi et mon petit frère Fancisco.

Francisco ne peut pas encore aller à l’école, il est trop petit, alors maman l’accroche sur son dos avec un grand drap noué sous ses fesses et elle peut aller partout sur les chemins, en forêt ou dans les champs sans devoir courir après lui.     

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equateur 6Le matin, il fait froid quand on se lève. Moi je dors dans un lit avec mes sœurs, Johanna et Michèle. C’est toujours Michèle la dernière, elle n’aime pas mettre ses pieds tous chauds sur la terre froide. Pendant qu’on s’habille, Maman a préparé l’ « avena », une boisson sucrée d’avoine avec du lait ou bien une soupe ou encore du riz. Il faut d’abord qu’elle allume le feu de bois. Ca sent bon l’eucalyptus ! Moi, j’enfile mon uniforme. J’aime bien l’écusson brodé sur mon pull et surtout, ma jupe plissée à bretelles. Ensuite, on mange rapidement et maman nous glisse un fruit dans le cartable ou du canguil (popcorn) qu’elle fait avec notre récolte de maïs séché. Puis je pars à l’école avec mes sœurs et mes frères Alexander et Jorge. Il est Sept heures quand nous rejoignons tous les enfants dans le chemin qui descend vers la vallée. Nous faisons attention de ne pas glisser pour arriver bien propres à l’école mais ce n’est pas facile, surtout quand il y a du brouillard ! N’empêche, je me fais souvent gronder parce que j’arrive toute crottée. Il y a des enfants qui prennent une paire de rechange dans leur sac mais moi, mes parents n’ont pas assez d’argent, je ne peux avoir qu’une paire de chaussures. En bas, on doit attendre le bus. Enfin, c’est souvent le bus qui nous attend ! Il klaxonne pour presser les derniers qui arrivent en courant, dévalant le sentier.

Quand on arrive en ville. C’est autre chose ! Les bus font beaucoup de bruit et ça klaxonne sans arrêt. On entre vite à l’école pour pouvoir jouer dans la cour.

Dans ma classe nous sommes quarante enfants. Ce n’est pas toujours facile d’avoir de la place pour poser son cahier correctement. Je fais des efforts pour bien écouter la maîtresse mais parfois je n’ai pas envie ou je rêve alors là, la maîtresse se fâche.

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A midi, c’est l’heure de rentrer. Je reprends le bus avec Michèle et Jorge mais Johanna et Alexander sont au collège et rentrent plus tard.

C’est plus long de remonter le chemin. On se raconte des histoires, ou ce qu’il s’est passé à l’école. Parfois on joue dans les arbres. On dit toujours bonjour aux gens qu’on croise, sinon maman ne serait pas contente.

On ne traîne pas trop quand même parce qu’on a faim !

Maman n’est pas là aujourd’hui, elle a laissé des pommes de terre et des fèves dans une casserole. On retire notre uniforme pour ne pas le salir davantage et on remet vite les habits quotidiens. C’est Michèle, la plus grande qui distribue le repas. Il faut en laisser pour Johanna et Jorge. Ensuite on fait nos devoirs. On en a beaucoup parce qu’on ne va à l’école que le matin. C’est dur les devoirs. En plus, on n’a pas de table pour travailler. Alors parfois, je vais voir les sœurs qui aident aux devoirs et nous prêtent même des livres et du papier de brouillon et même un goûter. Après ça, il faut aller nourrir les poules, les canards, le cochon, et le lapin. Les chiens, eux récupèrent ce qu’ils peuvent. Ils ne sont pas bien gros mais ça ne les empêchent pas d’aboyer sur tout ce qui approche de la maison.

Demain, c’est samedi, et nous fêterons le baptême d’une cousine. On retrouvera beaucoup de gens du village. On se connaît tous ici et on aime se retrouver pour manger un bouillon de poule et du riz. Quand c’est une grande fête, on tue un ou deux cochons pour nourrir tout le monde, chaque famille participe en apportant quelque chose à manger, et ces jours là, on en profite ! On mange beaucoup ! Et pour être sûr de ne rien gaspiller, on emporte les restes dans un sac plastique. Moi, ce que je préfère, ce sont les cochons d’Inde quand ils sont bien grillés. C’est délicieux. Mais les cochons d’Inde, on les vend plutôt que de les manger parce que ça coûte cher. Parfois, les gens se réunissent pour fabriquer le pain, la veille d’une fête. On les cuit dans un grand four à bois en briques. Et là, c’est déjà la fête. J’accompagne maman dans ces cas-là. Ca sent bon dans la maison !  Moi, je joue avec les autres enfants et les chiens, dans la pâture d’à côté.

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Dimanche, j’irai avec Michèle faire paître les vaches. Comme ça, maman pourra aller au marché et papa à la minga (travail collectif) pour creuser les fossés qui se sont rebouchés à force de pluies.

Moi, c’est ce que je préfère, aller dans le bois avec les vaches ! On est tranquille et on peut jouer tant qu’on veut, se rouler dans l’herbe, grimper aux arbres, jouer à cache-cache. Mais il ne faut surtout pas perdre de vue les vaches, ce serait une catastrophe si on nous les volait !

A la tombée de la nuit, ce sera l’heure d’aller à la messe. Il fait froid, on enfile notre bonnet, notre poncho et on court vite à la chapelle (construite par nos parents !). On retrouve les copains du caté, les parents, les oncles, les tantes, les grands-parents, les voisins pour chanter au son de la guitare et du tambour. Le prêtre arrive en 4x4 de la vallée un peu en retard parce qu’il arrive de loin. C’est pas grave, nous on chante pour Jésus en l’attendant. Il vient seulement une fois tous les 15 jours alors on peut bien l’attendre une demi-heure.

Ce soir, les étoiles brillent fort dans le ciel. On n’a pas de lampadaires qui nous empêcheraient de les voir toutes. En plus, on a aussi les étoiles à nos pieds aujourd’hui ! Ce sont des milliards de lucioles qui volètent comme des paillettes. Avec Michèle, on essaie de les attraper mais il est déjà l’heure d’aller se coucher. Demain, on se lève tôt !"

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